Pâques. Printemps. Campagne. Saveurs empreintes de symbolisme et de traditions anciennes. En Grèce et en Attique, Pâques est la plus grande fête de l’année, avec la nourriture occupant un rôle central. Elle est profondément liée à des traditions culinaires qui demeurent vives et encore pratiquées aujourd’hui, après toutes ces années.
Pour le christianisme orthodoxe, Pâques signifie la transition de la mort à la vie, et la souffrance de Dieu qui culmine, suivie de la résurrection (et de l’exaltation) de l’âme, se reflète sur la table familiale. Familles, amis et proches célèbrent la renaissance de la nature à la campagne, dans les magnifiques villages et îles de l’Attique. Pâques en Attique est extraordinaire et unique, une expérience à vivre au moins une fois dans sa vie…
Carême et jeûne de la Semaine Sainte
Le jeûne du Carême (40 jours) commence le Lundi des Cendres et se termine le vendredi de la sixième semaine. Il est suivi par le Samedi de Lazare et le Dimanche des Rameaux, après quoi commence la Semaine Sainte. Pour les fidèles de l’Attique, c’est une période de préparation à la crucifixion et à la résurrection du Christ, durant laquelle ils s’abstiennent de certains aliments, tels que la viande, le poisson, les produits laitiers, l’huile d’olive et le vin. De nos jours, le jeûne se pratique principalement pendant la Semaine Sainte, basé sur un régime végétal, légumineuses et fruits de mer.
Le Dimanche des Rameaux, les gens consomment traditionnellement du poisson, et il est permis de consommer de l’huile d’olive et du vin, juste avant le début de la Semaine Sainte.
Dès le Lundi Saint et le Mardi Saint, les préparatifs pour Pâques commencent. Les maisons et les cours sont nettoyées, et tout brille et resplendit, prêt à accueillir la résurrection du Christ. Les saveurs et recettes qui dominent la table familiale durant ces jours sont des tartes (comme la tarte aux épinards), des légumineuses avec ou sans riz, des fruits de mer (calamars, poulpes, seiches, crevettes), des « ladera » (plats de légumes cuisinés à l’huile d’olive) tels que le « briam » (ratatouille cuite au four), les « gemista » (légumes farcis et cuits au four), des haricots verts et des artichauts, ainsi que des olives, de la taramosalata et des salades fraîches.
Le soir du Mercredi Saint, après le service religieux, les femmes de l’Attique commencent les préparatifs du « tsoureki », le pain sucré traditionnel de Pâques, en commençant par la pâte. Le Jeudi Saint, elles pétrissent la pâte et cuisent les trourekia, les façonnant en tresses et les décorant d’un œuf rouge vif sur le dessus, ainsi que des biscuits de Pâques traditionnels. Vient ensuite le moment des œufs, qui sont bouillis puis teints en rouge, soit avec une teinture spéciale pour œufs, soit avec le jus des pelures d’oignons rouges bouillis, des betteraves et des fleurs de pavot.
Le Vendredi Saint est un jour de deuil absolu pour toute la chrétienté, un jour d’abstinence de travail et de nourriture. Dans l’après-midi, après la Déposition du Christ, les femmes et les jeunes filles décorent l’Épitaphe avec des fleurs de printemps et fabriquent des couronnes et des guirlandes. Toute la journée, les cloches des églises sonnent tristement à travers l’Attique, et la table familiale se compose traditionnellement de soupe de lentilles ou de haricots bouillis avec du vinaigre, de soupe de tomates et de légumes bouillis ou crus, le tout sans huile. Le soir du même jour, les matines du Samedi Saint sont récitée dans les églises, suivies de la procession de l’Épitaphe dans la paroisse, qui se déroule avec grande piété. Lors de la procession, les fidèles suivent l’Épitaphe avec des bougies allumées à la main, tandis qu’il est d’usage que les hommes, les femmes et les enfants se penchent et passent sous celle-ci pour « recevoir la grâce du Christ », tout en indiquant leur obéissance au Seigneur. Dans le quartier de Kamini à Hydra, l’Épitaphe et toute la procession se terminent au bord de la mer. Ensuite, les personnes qui portent l’Épitaphe entrent dans l’eau, la soutenant d’une manière à ce que ses pieds touchent la mer, afin qu’elle soit bénie et sanctifiée.
Le Samedi Saint est consacré aux préparatifs pour le jour suivant. Après la célébration de la résurrection à minuit, les familles s’asseyent à table et commencent par le « tsougrisma », le jeu de taper les œufs rouges. Puis vient le moment du premier plat de viande après le jeûne du Carême et de la Semaine Sainte : la traditionnelle mageiritsa.
Le jour de « Lambri » (Pâques) est arrivé, et tout est prêt pour le grand festin et les célébrations qui se déroulent traditionnellement dans toute l’Attique ! Le Dimanche de Pâques, un agneau entier à la broche commence à rôtir dans la cour de la maison, très tôt le matin. Cela prend des heures, alors en attendant, les premiers « mezedes », petits plats d’entrées, et les premières verres de vin apparaissent sur la table. Le marathon culinaire a commencé, avec plusieurs saveurs délicieuses, comme des fromages, du tzatziki, une salade de laitue avec des oignons nouveaux et de l’aneth, une salade grecque avec de la feta, des pommes de terre cuites au four, une tarte au fromage, ainsi que les plats typiques du jour, le kokoretsi et le kontosouvli. Le jeu de taper les œufs est lancé, et celui qui réussit à casser les œufs des autres sans casser le sien est le gagnant, ayant de la chance pour le reste de l’année. Vient ensuite le goût sucré du tsoureki (pain de Pâques), avec sa texture filandreuse et ses belles arômes, et les biscuits de Pâques.
Saveurs empreintes de symbolisme…
Œufs rouges
Sans aucun doute, ils sont la « marque de fabrique » de la table de Pâques. Teints traditionnellement en rouge – les variations de couleurs vives et de décorations sont également assez courantes – les œufs symbolisent la vie et la création. Ils sont toujours teints le Jeudi Saint, jour de la Dernière Cène. La couleur rouge symbolise le sang du Christ sur la croix, ainsi que la renaissance du monde et la joie de la résurrection, puisque l’œuf est symboliquement lié au tombeau de Jésus, qui a été trouvé vide. Avec le tapotement de l’œuf, sa coquille se fissure, et une nouvelle vie naît, tout comme la pierre tombale s’est fissurée lors de la résurrection.
Agneau et kokoretsi
L’agneau, le chevreau et le kokoretsi sont les stars du repas de Pâques, et, de manière intéressante, la manière dont ils sont préparés remonte à la Grèce antique. Lorsque les Grecs anciens faisaient rôtir de la viande à la broche, ils plongeaient une brindille de pin dans un jus de raisins et de prunes non mûrs, avec lequel ils badigeonnaient la viande, lui donnant une saveur aromatique de fruits et de résine. De nos jours, la viande est badigeonnée d’huile d’olive et de jus de citron. Pour préparer le kokoretsi (organes et abats de chèvre sur une longue broche, enroulés dans des intestins), les Grecs anciens faisaient mariner les intestins dans du vinaigre, de l’eau et du miel. Le vinaigre agissait comme antiseptique et déshydratant des intestins, les débarrassant de la graisse superflue, tandis que le miel créait un enrobage caramélisé.
L’agneau symbolise le sacrifice de Jésus, qui, en tant que « Agneau de Dieu », a porté les péchés du monde. La tradition du rôtissage de l’agneau à la broche le Dimanche de Pâques provient de la Pâque juive et est associée à l’exode des Juifs d’Égypte.
Tsoureki (pain de Pâques)
Incontournable dans les traditions chrétiennes, le pain symbolise le Corps du Christ, et le troureki est probablement la variante festive de pain la plus populaire. Il est également connu sous le nom de « kouloura tis Lambris » et est associé à la résurrection du Christ et à la vie éternelle. Il est préparé sous diverses formes, la plus populaire étant la tresse, et a la saveur et l’arôme distinctifs de mastic et/ou de mahlab. Un œuf rouge est généralement placé au centre du tsoureki.